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Journal d'un TCA
3 juin 2015

JOUR 1 : PAS DE SECRETS ENTRE NOUS

Premier jour post-révolution, ça n'a pas été la grande joie. Je me suis tellement fermée comme une huître que je peux être reconnaissante qu'on ne soit pas à Noël. Quelqu'un aurait pu vouloir me bouffer tellement la ressemblance aurait été frappante. 

Je suis allée au travail, comme tous les jours, et chaque chose que je mettais dans ma bouche était soumise à une analyse minutieuse. Pourquoi je mange ça ? Est-ce que j'ai faim ? Est-ce que j'ai déjà eu faim de toute façon ? Est-ce qu'on me regarde manger ? On dirait une gloutonne ? Ah oui on dirait sûrement une gloutonne. Est-ce qu'on me juge ? Ah oui sûrement, parce que moi si je le voyais je me jugerais. 

Grosse ambiance dans ma tête. 

Je n'ai pas réussi à déterminer pourquoi - oui je pensais naïvement que peut-être tout me semblerait fluide d'un coup et que je m'en débarrasserai facilement. Bon, j'avais tort. Ok. Impossible de comprendre pourquoi l'hyperphagie. Impossible de mettre le doigt sur toutes ces choses qui sont là, quelque part, et qui veillent à s'exprimer uniquement quand elles en ont envie et sans me laisser la possibilité de répliquer. 

Mais j'ai pris sur moi. Et j'ai appliqué un conseil que j'ai croisé plusieurs fois au cours de mes lectures sur le sujet. Il est souvent dit que l'un des problèmes de cette maladie, c'est que les crises ont lieu en cachette. Qu'on a tendance à se refermer, à tout garder pour soi. Et c'est vrai. Hypou m'a même déjà fait mentir plusieurs fois, à des personnes pourtant chères à mon coeur. Alors un seul mot : transparence. J'ai présenté Hypou à trois amies. Chères à mon coeur. Jamais dans le jugement. Juste toujours présentes, de jour comme de nuit, voisines comme à l'autre bout du monde, de feux d'artifice ou de tempête de sable. Puis, avec un peu plus de difficultés, je l'ai présentée à mon copain. Mon amoureux. Celui qui mériterait tellement que je sois parfaite.

On pourrait croire que c'est simple. Qu'une fois qu'on est sur notre lancée de toute façon plus rien ne peut nous arrêter. C'est totalement faux. A plusieurs reprises j'ai eu envie de rebrousser chemin, d'inventer quelque chose, n'importe quoi, tout sauf la vérité que j'étais sur le point de révéler. J'avais impression que j'étais sur le point de lâcher une bombe, qu'on allait me regarder comme si j'avais la peste, qu'ils seraient honteux de m'avoir comme amie. Je leur fais une confiance aveugle et pourtant une part de moi me disait que, peut-être, ils continueraient leur chemin en me laissant derrière. Parce que personne ne veut d'Hypou dans sa vie. Parce qu'on a tellement à combattre avec nos propres problèmes, on n'a pas toujours la force ou juste la possibilité de combattre ceux des autres, même si on les aime de tout notre coeur.

Et pourtant, ils sont là. Ils sont restés. Et je sais qu'ils resteront. Ils ne peuvent pas atteindre Hypou directement, ils ne peuvent pas la combattre à ma place, mais quand je serai épuisée, ils seront là. Quand j'avancerai, ils seront là. Quand j'aurai réussi, ils seront là. Il va falloir que je trouve une cargaison illimitée de remerciements et des idées de cadeaux trop cools et originaux pour toute la vie, et celle d'après.

Je suis blindée. Je ne suis pas toute seule. Hypou l'est.

Je garde en tête que ça ne va pas être tout rose. Que je vais tomber, pleurer, ne plus y croire. Une seule journée déjà et c'est moralement compliqué. J'ai trop de peurs en moi, mais qui n'en a pas ?

Personne.

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