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Journal d'un TCA
10 juin 2015

JOUR 8 : DE QUOI T'AS PEUR ?

Cet après-midi, ça va aussi.

On est allé mangé au Mac Do ce midi – je n’ai pas su y résister parce que je pense que mine de rien l’envie que j’ai su contrôler l’autre fois était restée dans un coin de ma tête. C’est plutôt positif puisque, alors que d’habitude je culpabilise à la première bouchée, là, aucun sentiment de ce genre.

Mais à mesure que l’après-midi est passée, je me suis aperçue que je n’avais pas pris de réel plaisir à manger là-bas. J’étais juste contente de manger. Parce que j’avais super super faim et que j’avais besoin d’un truc gras et malsain pour me sentir rassasiée. J’aurais mangé mon poids en haricots verts que le résultat n’aurait pas été le même, moralement.

Du coup je re-sombre dans ce dégoût de moi. J’aurais pu simplement limiter les dégâts, prendre une salade et des nuggets, le plaisir aurait été là mais la simplicité aussi. Mais non, je me suis fait péter le bide. A en avoir mal au ventre avant même d’avoir terminé.

J’en ai marre de ces montagnes russes. Marre de me sentir soulagée dès que j’ai le sentiment de prendre la bonne décision, marre de cette panique insidieuse qui m’envahit dès que la décision est définitivement prise, marre de ce corps que je traîne comme un boulet après chaque repas. Marre de cette façon extrême de tout faire.

Trop parler. Trop aimer. Trop manger. Trop prendre à cœur. Trop pleurer. Trop manger. Trop réfléchir. Trop raisonner. Trop calculer. Trop manger. Trop essayer de tout contrôler. Trop exiger. Trop attendre. Trop espérer. Trop manger.

Je me dis que même si je me mets au sport, ce qui va inévitablement arriver, je n’y arriverai pas, je gâcherai tout, comme à chaque fois, comme dans n’importe quelle chose que je peux entreprendre. Je me dis que même si je m’arrête de manger, je n’y arriverai pas. Que même si j’arrête de me mettre des barrières, je gâcherai tout.

J’en ai marre d’être moi. J’en ai marre de me dire que personne ne peut être fier de celle que je suis. Marre de penser que tout dépend de mon physique. On me trouve drôle ? Parce que je suis grosse, je compense. On me trouve exigeante ? C’est quand même dingue, quand on a ce physique là on ne se permet pas d’être aussi pointilleuse. On me dit que j’ai un beau visage ? Oui, à défaut de me dire que je suis belle, parce qu’avec un corps difforme on ne pourrait jamais me dire une chose pareille.

Je n’arrive pas à comprendre comment j’ai pu réussir, une fois. Comment je suis parvenue à me battre contre moi-même. J’en ai tellement marre de me battre. J’ai envie de m’arracher la peau, de m’arracher le corps, de m’arracher le gras, de m’arracher tous ces maux qui s’agglutinent à mon cœur et qui le font peser si lourd. J’ai envie de tout rayer, tout effacer. J'ai envie qu'on me donne un nouveau corps, un nouveau moi. Genre "Bon allez, tout ça, c'était pour la blagounette, maintenant on change et tu vas être trop contente tu vas voir.". Y'a pas de magasins, pour ça ?

J’ai envie de savoir qui je suis vraiment. J’ai l’impression de m’être perdue sous une montagne de graisse, de chagrin, de crises, et de peur. J’ai envie de me trouver et en même temps j’ai peur.

On m’a dit que j’étais mauvaise, aujourd’hui. On me dit que je suis susceptible. Que j’ai mille principes à la noix. Puis je ne suis pas si cultivée. Pas bien dégourdie. Je ne comprends pas grand-chose à ce qui m’entoure. Je n’arrive pas à m’intéresser à la politique, l’économie. Je n’ai pas de passion, je n'ai aucun talent particulier.

C’est pas top. Mais si c’était encore pire, une fois tous ces soucis disparus ? Si j’étais juste quelqu’un d’horrible, comme Voldemort* me l’a si souvent dit ? Si elle avait raison sur toute la ligne ? Je me crois différente depuis que je suis toute petite. J'étais intimement persuadée que j’avais quelque chose qui change. J’ai toujours voulu croire que c’était un destin de dingue, un pouvoir magique, ou juste une qualité rare. Mais non. Non en fait, c’est un truc nul. Un truc noir. Un truc aussi sombre qu’elle.

Je croyais que j’avais peur du monde. Des gens. De ma relation avec eux. Mais je crois que je me suis trompée. Je me cache derrière cette obsession pour mon corps et pour mon poids parce que c’est tout ce qu’il me reste. C’est tout ce qui me sépare de ce qui me fait vraiment peur.

Moi-même.

Moi la bancale, l’indécise, la peureuse, la pleureuse, celle qui ne va jamais au bout des choses, celle qui râle pour rien, qui se vexe pour tout.

J’ai peur de moi.

Et de, si j’arrive à me sortir de tout ça, me détester et me dégoûter encore plus.

*Voldemort, c'est comme ça que j'appelle un de mes vieux Démons dont j'ai réussi à me défaire, au moins physiquement.

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